Bonjour, je m’appelle Axelle et j’ai 18 ans. Je suis la maman d’une petite Mariah de 13 mois et je suis ce qu’on appelle un mère ado. Je mentirai en disant que c’était prévu mais je suis une grande sentimentale et quand j’ai rencontré Thibault on a voulu construire notre famille. Dans notre esprit c’était pas pour tout de suite mais c’est arrivé plus tôt que prévu. Ce qui était encore moins prévu est que je me retrouve veuve à 17 ans.
J’ai appris que j’étais enceinte dans les toilettes de mon lycée que je fréquente toujours. J’ai fait un test sur les conseils de l’infirmière du lycée. Il était positif. J’ai laissé mon sac dans les toilettes et j’ai couru vers la salle ou mon Thibault avait cours. J’ai fait irruption dans la salle de classe et je lui ai annoncé la bonne nouvelle à l’oreille. Je me suis pris deux heures de colle pour ça. C’est en permanence sous le regard d’un pion que j’ai commencé ma vie de mère ado.
Nous avions convenu que nous resterions chez nos parents encore quelques années. Le temps d’avoir notre bac pro et notre BTS après. Nos parents n’ont pas sauté au plafond de joie. Mais ils nous ont aidés comme ils ont pu, même si parfois nos relations ont été compliquées.
Mère ado très amoureuse.
A ce moment ou j’allais devenir une mère ado, ce serait mentir de dire que je me suis sentie mère tout de suite. J’ai eu surtout l’impression d’aller au bout d’une histoire d’amour, de la graver dans de la pierre. On est très romantique quand on a 16 ans … Mon corps qui se transformait me faisait peur mais je me réjouissais de donner la vie d’un petit Thibault. Notre histoire allait bien même si des histoires de jalousies venaient par moment couvrir de nuages notre histoire amoureuse. Mais nous étions deux contre le reste du monde.
Mère ado et blâmée, considérée comme incapable.
Je passe très vite sur ce qui s’est passé ensuite. J’ai accouché légèrement en avance. Thibault était là mais nos familles aussi. Et ça nous a vexé car nous avions l’impression qu’on nous volait un peu de ce moment important. J’ai fait un beau baby blues en partie à cause de ça. Nous étions adultes. Peut-être pas tout à fait encore indépendants mais nos parents ne se sont pas rendus compte à quel point le fait de devenir mère ado et père ado nous a fait grandir vite. En quelques mois seulement.
Je n’aimais pas non plus qu’on me dise que j’avais de la chance que Thibault ne m’ai pas laissée tomber. Comme s’il aurait été normal qu’il le fasse. Comme si j’étais seule responsable. Et surtout comme si notre histoire d’amour n’était qu’un flirt d’ados sans importance. Quand je pense que nos grands-parents se sont rencontrés au même âge et qu’ils ont passé leurs vies entières ensemble. Et qu’ils étaient là à nous faire sans cesse des reproches.
Le jour ou je suis devenue veuve.
Beaucoup de gens me disent que je n’ai pas droit à ce statut parce-que nous n’étions pas mariés. Je me suis habituée à beaucoup d’indélicatesse mais à celle-là je ne m’y fait pas. Je veux bien être considérée comme une mère ado alors que je suis d’abord mère tout court. Laissez-moi me considérer comme veuve.
Mais je vais vous raconter ce qui s’est passé. Un soir, Thibault et moi devions aller à une soirée pour fêter le bac de nos amis qui étaient dans la classe supérieure. Je n’y suis pas allée car nous ne voulions pas laisser Mariah à nos parents et ils auraient mal pris qu’on prenne une baby-sitter (ce qui est franchement un gros problème de plus mais passons). Alors je suis restée à la maison et Thibault est parti avec des copains en voiture.
Vers 23 heures, Thilbault à décidé de rentrer auprès de moi. Mais certains de ses amis avaient bu dont ceux qui devaient le ramener en voiture. Alors il a pris le scooter d’un autre ami. Lui n’avait pas bu une seule goutte d’alcool. Il a glissé sur de l’eau car il s’est mis à beaucoup pleuvoir et a été éjecté du scooter. Il est finalement décédé dans le camion des pompiers d’un arrêt cardiaque. Je l’ai su vers 2 heures du matin. Je suis incapable de me souvenir de ce que j’ai fait après l’avoir su. J’ai beaucoup pleuré ça c’est sûr. Mais je ne me souviens de rien d’autre.
Pas reconnue.
Je veux bien que nous étions jeunes et que Thibault avait des parents aussi. Mais j’ai l’impression d’avoir été écartée de tout. On m’a à peine écoutée quand j’ai parlé des volontés de Thibault concernant ses funérailles. Je dis à peine mais en fait personne ne m’a écoutée. Je n’ai même pas été présentée comme sa compagne lors de ses funérailles. Peu de personnes finalement extérieures au lycée ne m’ont présenté leurs condoléances.
C’était comme si j’étais la mère ado toxique avec qui Thibault avait perdu son temps, à la fin de sa jeune vie. J’en ai fait une dépression dont je me remet petit à petit.
Pour m’en sortir, je suis partie de chez mes parents et je limite au strict minimum mes rapports avec mes ex beaux-parents qui ne se sont jamais considérés comme tels. Je vis dans un foyer pour jeune maman et je continue mes études. Je ne veux plus voir mes grands-parents. J’ai décidé de m’éloigner de tous ces gens sur les conseils de la psy du foyer et des éducatrices. Je commence enfin à vivre plus sereinement et j’espère qu’un jour de là ou il est Thibault sera très fier de moi.
Je voudrais vous dire merci pour vos articles qui m’inspirent et m’aident à transformer la colère que j’ai en moi et la peine que j’ai à avoir perdu Thibault en une force. Pour devenir une mère ado comme celle qui a témoigné récemment pour vous aussi. C’est un exemple pour moi.
Je suis le défi aussi comme beaucoup de mamans de mon foyer de jeunes mamans. On veut toutes s’en sortir et vous nous aidez beaucoup.